samedi 15 mai 2010

Tranche de vie.

Le lapin dans ma cuisine effectue et répète une sorte de... Danse, une danse bizarre. Il prend du recul, lentement, puis court et saute contre le mur. Puis il recommence. Encore et encore. Ca fait vingt minutes que ce petit manège continue. On dirait un peu une métaphore de ma vie. Avec deux grandes oreilles et encore plus de poils, certes. "J'ai compris", je lui dis, rageur. "C'est bon, arrête, s'il t'arrive quelque chose de grave, on va encore dire que c'est de ma faute..."

A quoi bon prendre du recul, m'explique-t-il le nez en sang, si c'est pour continuer à focaliser son regard contre le mur qu'on croit inévitablement devoir se prendre en pleine gueule. Ca nous conditionne. On s'auto-persuade que ce mur est la seul issue. Prendre du recul doit servir à découvrir d'autres horizons. Pas à mieux admirer la fatalité que l'on côtoie déjà. 

Moi je veux bien. Mais quand je tente de faire passer un message, j'explique en général les choses différemment qu'en me cognant la tête contre un mur. Ca manque de crédibilité, que j'essaie de lui expliquer. Lui me soutient qu'il faut pas voir le sang sur son museau, mais la symbolique métaphorique. 

Pas envie de discussions métaphysiques ce soir, alors je le regarde en coin, méchamment, en murmurant : "J'ai faim." Il ne répond rien, un brin soucieux. Si les lapins avaient un bec, le sien je le lui aurais cloué. 

Il soupire et s'assoit à côté de moi sur le canapé. "T'as du tabac pour ma pipe ?", qu'il demande. "Si tu bossais, tu pourrais t'en payer toi-même...", que je lui répond, en lui passant néanmoins la marchandise.

On fume côte à côte en silence. Moi, je garde les yeux rivés sur mon ordinateur : J'avais pas envie de compagnie ce soir. Lui souffle des ronds de fumée, l'air grave, il se la joue philosophe au regard perdue dans une réflexion profonde, ah, frimeur de lapin de merde. 

Puis d'un coup il s'arrête, et décrète avec autorité : "Faut vraiment qu'on arrête de fumer, tous les deux". Son ton sans cesse moralisateur me fatigue. Alors du coup, je me lève, et je vais me coucher...

vendredi 7 mai 2010

Souvenirs...

Elle m'a dit que j'étais juste quelqu'un de bien. Que je devais croire en moi. Elle a prétendu tant de choses, inventés tellement d'exemples, pour me convaincre que... Que j'étais le meilleur, que j'étais au dessus, une personne rare, qu'elle a dit. Précieuse. Qu'elle était heureuse de me compter au nombre de ses relations, que ce devrait être le cas de tous ceux qui me connaissent, que ceux qui ne comprenaient pas tout ça n'étaient que des aveugles.

Ne les écoute pas, eux, m'a-t-elle suppliée ; Ne l'écoute pas, elle. "Tu vaux mieux qu'eux". Mais ça veut dire quoi, "mieux", que je répondais, "mieux pour quoi ?", "mieux en quoi ?"... 

Je me souviens d'une phrase en particulier. "Ce ne sont que des porcs, tellement obnubilés par leurs propres nombrils et leurs pseudos-problèmes qu'ils passent à côté de tout ce que la vie peut leur apporter de magique". Magique, que j'étais, selon elle. Magique, carrément. Non pas que j'en croyais un traitre mot. Mais ça faisait du bien, tellement de bien, finalement, de l'entendre débiter ses âneries...

Elle s'approchait, sa voix, puis s'éloignait, elle se faisait parfois forte, parfois douce, elle argumentait, plaisantait, me comparait à loisir avec nos connaissances communes. "Et elle...", finissait-elle, baissant d'une octave, le ton de la confidence... 

"Je suis là, moi", poursuivait-elle, pernicieuse. "Pourquoi elle ? Je suis là. Moi je vois, moi je sais", et ça continuait, et c'était nettement moins agréable à entendre, là.

"Quelqu'un de bien...", la conclusion qui rejoint l'introduction, une phrase sans fin réelle, une phrase qui se meurt. Puis je pleurais. Puis elle passait à autre chose, futilités diverses. Presque tout les jours, qu'on se voyait, en secret, rapidement, relation anonyme et coupable. Puis un jour, elle est partie.

Elle n'est plus jamais revenu. La voix à l'intérieur de ma tête.

jeudi 6 mai 2010

Suicide.

Parfois, je pense à me suicider. Puis j'abandonne. L'idée d'alimenter les rumeurs pendant des décennies, comme quoi mon assassinat aurait été maquillé, ou comme quoi je serais en retraite sur une île déserte en compagnie de Bob Marley et de Kurt Cobain, me gène au plus haut point.

mardi 4 mai 2010

Collectionneur.

Ceux qui collectionnent les timbres sont appelés "philatélistes". Ceux qui collectionnent les portes-clefs sont des "copocléphiles". Ceux qui recherchent cafards sur cafards font partie des "entomologues". Moi, je collectionne les échecs et les déceptions. Ai-je au moins droit à un nom aussi suffisant ?